Patient décédé après 16 heures aux urgences
Un décès dans une salle d’urgence à Ormstown, près de Valleyfield, environ à une heure de route de Montréal, sème l’émoi au Québec.
Selon Radio-Canada, un homme de 70 ans est décédé des suites d’un anévrisme de l’aorte, après avoir passé 16 heures au service des urgences d’un hôpital sans avoir été vu par un médecin.
Cet incident pousse des médecins à dénoncer les conditions qui règnent en ce moment dans le système de santé québécois.
Le Dr Sébastien Marin, qui travaillait dans la salle d’urgence, a révélé les détails sur Twitter.
Le Dr Marin affirme que le patient décédé est d’abord rentré chez lui, faute d’avoir vu un médecin, après avoir passé 16 heures à l’urgence d’un premier hôpital.
La dégradation de son état a forcé l’homme à retourner à l’hôpital le lendemain. Cette fois-ci, il a choisi d’aller au Barrie Memorial, le centre hospitalier où travaille le Dr Marin.
Il est mort environ 10 minutes après son arrivée.
« Quand je l’ai vu, j’ai tout de suite pensé à une section de l’aorte, parce qu’il était connu pour ça », a indiqué le Dr Marin en entrevue à Radio-Canada. « Je vois des patients qui décèdent tous les jours. C’est la vie, mais lui, il ne devait pas décéder. »
En effet, le septuagénaire avait récemment subi un anévrisme, selon son dossier médical.
« L’engorgement des urgences fait craindre le pire, » dit le D r Gilbert Boucher, président de l’ASMUQ (l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec). « Il est évident qu’avec l’engorgement des urgences, avec le nombre de patients qui quittent [sic] sans avoir vu de médecin, on met la population à risque avec des circonstances comme cela. »
« Malheureusement, depuis cinq ou six mois, il y a beaucoup de patients qui repartent sans avoir vu de médecin. Nos infirmières au triage font un excellent travail, mais elles aussi sont sous pression », selon le Dr Boucher.
« Si ce patient avait été vu dans des délais raisonnables, on ne dit pas qu’il aurait survécu, mais il aurait eu au moins une chance », a-t-il encore mentionné.
Le Dr Boucher est inquiet non seulement des risques d’« oublier » un patient parce que son évaluation a été mal effectuée, mais aussi des dangers posés par la dégradation de l’état de santé d’une personne forcée d’attendre 8, 10, 12, 15 heures aux urgences.
« On met les soignants dans des situations insoutenables. Il n’y a pas de lits, il n’y a pas de civières, les salles d’attente sont pleines; il faut prendre des décisions après des entrevues de trois à cinq minutes […]. C’est là que ça devient extrêmement dangereux. »
Toujours selon le D r Boucher, un message très clair a été transmis aux responsables du réseau de la santé et au gouvernement : l’engorgement est terrible, on est en rupture de service, on ne peut plus servir la population, il y a des risques pour cette dernière.
Selon les estimations officielles citées par la CBC, au moins 834 000 Québécois.e.s sont maintenant sur une liste d’attente pour un médecin de famille. Cette attente est particulièrement prononcée dans la région de Montréal, où un nombre croissant de médecins généralistes approchent de l’âge de la retraite.
Les Québécois.es se rendent en grand nombre à l’urgence parce qu’ils n’ont pas accès aux soins de première ligne. La Coalition canadienne de la santé reconnaît la nécessité de passer à une approche communautaire, fondée sur des équipes multidisciplinaires, pour la gestion, l’organisation et la prestation des services, en particulier dans le domaine des soins primaires. Les niveaux de services doivent être suffisants pour que la charge des soins n’incombe pas aux familles, principalement aux femmes.