Les fournisseurs privés de télésanté s’opposent à la retenue des paiements de transfert aux provinces qui autorisent les frais d’utilisation et la surfacturation
Selon un rapport du Globe and Mail, les assureurs privés et les fournisseurs de soins de santé en ligne sont contrariés par le fait que le gouvernement fédéral déclare qu’il pourrait pénaliser les provinces qui autorisent les fournisseurs privés à facturer des frais d’utilisation pour les soins primaires médicalement nécessaires.
Les entreprises privées affirment que l’arrêt de la surfacturation et d’autres frais compromettra l’accès à ce qui est devenu une prestation populaire sur le lieu de travail. Mark Holland, actuel ministre fédéral de la santé et l’ancien ministre de la santé Jean-Yves Duclos ont déclaré qu’ils publieraient ce que l’on appelle une lettre d’interprétation clarifiant les implications dans le cadre de la loi canadienne sur la santé des soins médicalement nécessaires fournis virtuellement et en privé.
De nombreux services en ligne sont dispensés par des infirmières praticiennes, et non par des médecins.
Danyaal Raza, ancien président de Canadian Doctors for Medicare et médecin de famille au St Micheal’s Hospital de Toronto, estime que les prestataires privés placent les médecins derrière des murs payants, ce qui constitue un grave manquement à l’éthique. « Ce n’est pas ce que les Canadiens attendent de leur système de santé », a déclaré M. Raza au Globe and Mail.
Le Dr Lauren Lapointe-Shaw, interniste et chercheuse à l’Université de Toronto, a dirigé une étude qui a révélé que les patients qui avaient eu une visite virtuelle avec un médecin ou une infirmière de l’extérieur qu’ils ne connaissaient pas étaient 66 % plus susceptibles de se rendre aux urgences dans les sept jours, par rapport à ceux qui avaient vu leur propre médecin de manière virtuelle.
Le gouvernement fédéral est de plus en plus pressé de s’attaquer au nombre croissant de cliniques privées et de sociétés de soins de santé virtuels qui facturent aux patients des frais d’adhésion ou d’utilisation pour des services qui sont gratuits s’ils sont fournis par des médecins du système public.
La Loi canadienne sur la santé, adoptée à l’unanimité en 1984, ne s’applique qu’aux services fournis à l’hôpital par des médecins, de sorte que les infirmières praticiennes et les autres professionnels de la santé peuvent exercer leurs activités en dehors de l’ACS. Cela signifie que dans certaines juridictions, il existe des failles qui permettent aux patients de payer les services avec leur carte de crédit. Cela signifie également que les provinces qui autorisent de telles pratiques s’exposent à ce que le gouvernement fédéral leur supprime les transferts de fonds pour la santé, pour avoir enfreint l’interdiction des frais d’utilisation prévue par la loi.
Profiteers price-gouging patients isn’t fair. We need to bring down medical paywalls. NPs and virtual care is key, but using a credit card leaves many behind. Subscriptions, membership fees and bundled services corrode our nation. @kellygrant1 @CMA_Docs @CdnDrs4Medicare https://t.co/4keEjx0pPf pic.twitter.com/w4N48IIgUs
— Raghu Venugopal MD (@raghu_venugopal) August 7, 2024
Les services privés à but lucratif de « télésanté » ou de soins virtuels en ligne sont une véritable manne de profits
Le marché canadien de la télémédecine était évalué à 4,864 milliards de dollars en 2022, et on estime qu’il augmentera à un taux de croissance annuel composé de 18,2 % entre 2022 et 2030, pour atteindre 18,532 milliards de dollars en 2030.
Maple et Shopper’s Drug Mart, toutes deux propriétés de Loblaw, Dialogue, propriété de Sun Life Insurance, Rocket Doctor et une multitude d’autres entreprises se sont lancés dans les services de santé privées en lignes pendant et depuis la pandémie.
Le directeur du fournisseur en ligne Maple Corporation a déclaré au Globe qu’une lettre d’interprétation du gouvernement fédéral compliquerait les choses pour les 6,5 millions de personnes qui n’ont pas de médecin. Par exemple, pour 79,99 dollars par mois (960 dollars par an avant impôts), Maple met les patients en relation avec des médecins par le biais de messages textes sécurisés et donne accès à des infirmières praticiennes pour les arrêts de travail et les ordonnances.
Selon l’Association canadienne des compagnies d’assurances vie et santé, citée dans le Globe, environ 10 millions de Canadiens bénéficient d’une forme de soins primaires par l’intermédiaire de sources privées à but lucratif, virtuelles ou en ligne, dans le cadre des prestations de santé offertes par leur employeur.
La question d’une clarification par le gouvernement fédéral du statut de ces formes de couverture privée à but lucratif a été soulevée en juillet lorsque l’Association médicale canadienne (AMC), le groupe de pression représentant les médecins à travers le Canada, a publié un document d’orientation sur « l’équilibre entre les soins de santé publics et privés ».
L’AMC recommende que les gouvernements « fassent respecter l’interdiction des frais d’utilisation de la Lois canadienne de la santé en sévissant contre les juridictions qui autorisent la facturation de frais d’adhésion, de frais d’utilisation ou de paiements groupés (bundled payments) ».