L’assurance médicaments est un moyen de gagner des voix pour les politiciens selon un sondage d’Environics
Les Canadiens veulent un régime d’assurance médicaments et sont prêts à voter contre leur premier ministre s’il ne le soutient pas. C’est l’une des conclusions d’un récent sondage sur les attitudes à l’égard des soins de santé réalisé par Environics Research.
Derek Leebosh d’Environics Research et Steven Staples de la Coalition canadienne de la santé ont discuté des résultats du sondage avec Anne Lagacé Dowson, directrice des médias de la Coalition canadienne de la santé, lors d’un webinaire organisé le 17 septembre 2024. Le sondage, réalisé auprès de 2 135 Canadiens entre le 26 juin et le 9 juillet, a mis en évidence la profonde inquiétude de la population à l’égard des soins de santé publics.
Le webinaire peut être visionné ici –
Les Canadiens souhaitent que leurs premiers ministres collaborent avec le gouvernement fédéral pour mettre fin à ce que 74 % d’entre eux considèrent comme une crise dans leurs systèmes de santé provinciaux.
Leebosh a fait remarquer que plus de 80 % des habitants des provinces de l’Atlantique et du Québec pensent que le système de santé de leur province est actuellement en crise.
En ce qui concerne l’assurance médicaments, Leebosh a déclaré que « ce qui est remarquable selon les chiffres, c’est que 75 % des Canadiens se sont déclarés en faveur de cette assurance, et 40 % d’entre eux la soutiennent fermement. La proportion de personnes qui s’y opposent n’est que de 14 % ».
« Lorsque nous avons croisé ces données avec la façon dont les gens voteraient lors d’une élection fédérale, nous avons constaté que 63 % des électeurs conservateurs soutiennent un programme national d’assurance médicaments », selon Leebosh.
« Lorsque nous examinons la répartition par province, nous constatons qu’elle est remarquablement cohérente dans l’ensemble du pays. Le taux de soutien se situe entre 75 et 80 % dans chaque province », a ajouté Leebosh.
C’est en Nouvelle-Écosse que le soutien à l’assurance médicaments est le plus élevé, avec 52 % d’opinions favorables.
« Lorsque nous avons mentionné que la première étape du programme d’assurance médicaments du gouvernement fédéral consistait à travailler avec les provinces pour fournir une couverture gratuite pour deux types de médicaments, les contraceptifs ainsi que les médicaments et les dispositifs pour le diabète, nous avons constaté que 80 % des gens étaient tout à fait ou plutôt favorables à cette idée », a déclaré Leebosh.
« Il est très intéressant de voir les dirigeants des deux partis fédéraux revendiquer la victoire de la loi sur l’assurance médicaments lorsqu’elle a été adoptée par la Chambre des communes en juin », a déclaré Staples. « Je pense que c’est très positif. »
« La première province à faire un pas en avant est la Colombie-Britannique », a déclaré Staples, qui a expliqué que cette province et le gouvernement fédéral ont signé un accord non seulement sur les contraceptifs sur ordonnance et les médicaments contre le diabète, mais aussi sur les traitements hormonaux de substitution. Cela prouve que les provinces pourront élargir le programme à leur guise.
Staples a fait remarquer que la Colombie-Britannique a montré ce qui peut arriver lorsque le gouvernement fédéral finance des médicaments qui peuvent déjà être couverts par la province. « Elle aurait pu se contenter d’empocher une partie de l’argent… mais au lieu de cela, la Colombie-Britannique a dit qu’elle allait le prendre et élargir le programme pour inclure le traitement hormonal de substitution pour toutes les personnes ménopausées », a déclaré Staples, qui a fait remarquer que la législation sur l’assurance médicaments doit être adoptée maintenant, car il sera difficile pour tout futur gouvernement de la supprimer.
Le sondage a révélé que les personnes à faible revenu sont plus favorables à l’assurance médicaments que les personnes à revenu élevé et employées à temps plein. Cela n’est pas surprenant, étant donné que les personnes à hauts revenus sont plus susceptibles d’avoir déjà un régime d’assurance-médicaments. Le soutien est également un peu plus faible au Québec, ce qui, selon Dowson, pourrait être dû au régime d’assurance médicaments québécois déjà en place. Leebosh a également noté que le soutien à l’assurance médicaments était élevé dans les provinces de l’Atlantique ainsi qu’en Alberta et en Saskatchewan.
Leebosh a rappelé les trois élections provinciales à venir. « Nous avons demandé aux gens quel impact pourrait avoir un refus de leur premier ministre de collaborer avec le gouvernement fédéral pour mettre en œuvre l’assurance médicaments dans leur province, et s’ils étaient plus ou moins enclins à voter pour lui lors des prochaines élections provinciales, ou si cela ne ferait aucune différence. Quarante-six pour cent des personnes interrogées ont déclaré qu’elles seraient moins enclines à voter pour leur premier ministre et leur parti s’ils rejetaient l’assurance médicaments », a déclaré Leebosh.
« Au Nouveau-Brunswick, par exemple, où des élections provinciales auront lieu cet automne, 52 % des gens ont dit qu’ils seraient moins enclins à voter pour un chef de parti qui veut devenir leur premier ministre s’il rejetait l’assurance médicaments. En Saskatchewan, une province qui a également des élections à venir, ce taux est de 43 %. En Colombie-Britannique, le taux est de 46 %. Le taux le plus élevé est celui de la Nouvelle-Écosse (54 %), qui prévoit des élections en 2025 », a ajouté Leebosh.
Staples a ajouté que des élections récentes ont montré que le soutien public aux soins de santé est un facteur de réussite électorale pour les partis politiques.
« Lors de l’élection récente au Manitoba, où on a vu Wab Kinew et le NPD prendre le pouvoir, il s’agissait d’une élection sur la santé, et en Nouvelle-Écosse, où les conservateurs ont beaucoup misé sur la santé, ils ont pris le pouvoir, donc on peut dire que pour tous les partis, la santé est un dossier gagnant lors des élections provinciales », a déclaré Staples.
Comme on estime que 6,5 millions de Canadiens n’ont pas accès aux soins primaires, la question de la dotation en personnel de santé a également été posée à ceux qui ont participé au sondage.
Environ deux tiers des personnes interrogées pensent que le premier ministre et le gouvernement de leur province ne font pas assez d’efforts pour fidéliser les travailleurs de la santé, tandis que 25 % pensent qu’ils font tout ce qu’ils peuvent dans les circonstances actuelles.
Une majorité écrasante de 81 % des personnes interrogées est favorable à une collaboration entre les provinces et le gouvernement fédéral en matière de maintien en poste et de recrutement des travailleurs de la santé, et 79 % sont tout à fait ou plutôt d’accord avec l’idée d’engager des dépenses d’urgence pour le maintien en poste des travailleurs de la santé.
« Nous savons ce qui contribue à la crise de la rétention des travailleurs de la santé : les salaires pour commencer. Nous avons vu des grèves importantes au Québec et en Ontario, mais il y a aussi les conditions de travail. Pouvez-vous imaginer un emploi où les heures supplémentaires sont obligatoires? L’épuisement professionnel est énorme. On ne peut pas reprocher à quelqu’un de vouloir quitter pour ne pas vivre ce genre de vie », a déclaré Staples, qui a fait remarquer que les entreprises privées piquent les travailleurs de la santé épuisés du système public, et les paient davantage, tout en facturant un montant énorme au système public.
« C’est comme si le gouvernement licenciait des travailleurs et les réengageait en tant que consultants », a ajouté Leebosh.
Les panélistes sont revenus sur la question de l’assurance médicaments et sur le fait que son soutien dépasse les clivages politiques. La loi sur l’assurance médicaments est actuellement devant le Sénat. La Coalition canadienne de la santé espère qu’elle fera l’objet d’une procédure accélérée afin que des accords puissent être conclus avec les provinces et les territoires, et que les médicaments puissent être mis à la disposition des personnes qui en ont besoin dès maintenant.