Il ne s’agit pas seulement d’argent : Séries de solutions, partie XI
Il s’agit de la onzième partie d’une série qui examine les obstacles politiques et solutions afin de réduire les temps d’attente en chirurgie au Canada. Les séries ont été adaptées d’un document de recherche par Andrew Longhurst. Le document au complet avec une liste de références pour les notes de bas de page est disponible ici.
Il n’y a aucun doute que les gouvernements doivent accorder la priorité à l’amélioration des systèmes afin de réduire les temps d’attente pour les interventions chirurgicales, des investissements continus dans la capacité des soins aigus et les soins aux personnes âgées sont aussi nécessaires. Le besoin d’importantes nouvelles dépenses à la capacité de soins aigus dépend en grande partie sur l’ampleur pour améliorer la livraison de soins chirurgicaux ainsi que des investissements dans les soins à domicile des personnes âgées et les soins communautaires.
Le Canada est près de la moyenne d’OCDE par personne (1 726 $) quant aux dépenses d’hôpital du secteur public à 1 615$ par personne (2019).[125] Même avant les années de la pandémie COVID-19, les dépenses par personne étaient à la hausse, et les dépenses des hôpitaux en pourcentage de l’économie sont généralement restées stables pendant les dix dernières années (figure 4). Cependant, le Canada dépense moins en pourcentage de l’économie sur les soins à long terme publics comparativement à d’autres pays ayant des salaires élevés et des systèmes financés avec des fonds publics (figure 5). Les soins à long terme sont reconnus afin d’aider à réduire le surpeuplement et les soins aigus à long terme et investir dans cette partie du système de santé peut, à son tour, aider à réduire les temps d’attente pour les interventions chirurgicales. Des données comparatives au niveau national pour les soins à domicile et les soins primaires – important pour réduire les pressions des services aigus des hôpitaux – ne sont pas facilement disponibles.
Figure 4: Dépenses hospitalières du secteur public au Canada, 1975 à 2021
Source : Calculs de l’auteur à partir du tableau C.3.1 de l’ICIS (2022a) et des annexes A, B, D.
Figure 5: Dépenses de soins de longue durée financées par l’État en pourcentage du PIB au Canada et dans certains pays de l’OCDE, 2020
Source : OCDE, 2022b
Le financement fédéral des soins de santé : veuillez y mettre des conditions
Le transfert canadien en matière de santé (TCS) est le plus important paiement de transfert fédéral aux provinces. Lorsque les soins de santé publique fut établie au Canada, ils étaient basés sur le principe d’un partage de coûts de 50%-50% entre les gouvernements fédéral et provincial. Mais à travers les années, les contributions fédérales ont considérablement diminué. En 2019/20, le gouvernement fédéral contribua 23,4 pour cent du total des coûts du système de soins de santé publique à travers le TCS.[126] Pour être juste, et comme le déclare le gouvernement fédéral, cette distribution de financement ne prend pas en compte le transfert du gouvernement fédéral de points d’impôts aux provinces, qui permettait dans les provinces d’augmenter leur capacité d’augmenter leurs revenus.
Le gouvernement libéral fédéral actuel maintient que la formule révisée du TCS, établi par l’ancien gouvernement conservateur, a entrainé une réduction du financement de la santé.[127] En 2016/17, le gouvernement fédéral négocia des accords bilatéraux avec chaque province fixant le TCS (par exemple, augmentations annuelles) à la croissance nominale du PIB (avec un plancher de 3 pour cent), avec un total de 11,5 milliards de dollars supplémentaires de financement visé pour la santé mentale et les soins à domicile.[128] Ce chiffre est inférieur à l’indexation de 5,2 % nécessaire pour maintenir les services existants, comme l’ont recommandé les gouvernements provinciaux, le CCPA, la Coalition canadienne de la santé et le Bureau parlementaire du budget, entre autres. Comme le montre le tableau 6, le facteur d’indexation du TCS est tombé en dessous de 6 % après 2016/17. Même avec les 11,5 milliards de dollars supplémentaires destinés à la santé mentale et aux soins à domicile, on estimait en 2017 que les accords bilatéraux laisseraient aux provinces un manque à gagner de 31 milliards de dollars sur dix ans (de 2016/17 à 2026/27).[129]
L’entente de financement de la santé récemment négocié au niveau fédéral s’appuie sur d’importants transferts ciblés en matière de santé (appelés compléments du TCS) en réponse à la pandémie et aux arriérés chirurgicaux, à hauteur de 500 millions de dollars en 2019/20 et de 4 milliards de dollars en 2020/21.[130] Annoncée en février 2023, la nouvelle entente fédérale fournira aux provinces un nouveau financement de 46,2 milliards de dollars sur une période de dix années par une augmentation du TCS (garantie à 5 pour cent par année pour les accords bilatéraux avec les provinces). Il prévoit également un complément de salaire pour les assistants personnels. Au total, seuls 58 % de l’accord de financement décennal sont assortis de conditions.[131] A noter, les grandes provinces – l’Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique – seront exigées de moins dépenser de ce qu’elles reçoivent pour les soins de santé, allant de 0,54 $ à 0,57 $ pour chaque dollar qu’elles reçoivent.
Le financement fédéral – que ce soit par le biais du TCS ou les accords bilatéraux – devrait être utilisé afin de tenir les provinces équitables et exige des améliorations au système. Au minimum, ces fonds doivent réellement financer les services de santé, ne pas être utilisés pour gonfler les excédents ou pour payer les réductions d’impôts. Malheureusement, la nouvelle entente fédérale ne change pas fondamentalement la relation fiscale entre les gouvernements fédéral et provinciaux et appuie la transformation du système. Il s’agit d’une occasion manquée – et un domaine dans lequel le gouvernement fédéral doit jouer un rôle beaucoup plus important.
Tableau 6: Transfert canadien en matière de la santé, 2004/05 to 2019/20
Source : Gouvernement du Canada, 2019b; ICIS, 2022a.
À noter : Les dépenses provinciales sur la santé sont disponibles par année civile.
Réduire les temps d’attente au Canada
Les temps d’attente de chirurgies exigent une action politique urgente. Bien que les provinces canadiennes aient fait des améliorations au cours de la dernière décennie, les retards dans les opérations chirurgicales dus à la pandémie actuelle de COVID-19 obligent les provinces et le gouvernement fédéral à s’occuper d’urgence de l’accès aux services chirurgicaux.
Ce rapport évalue le succès mixte du Canada afin de réduire les temps d’attente avant et pendant la pandémie en cours. Il identifie sept facteurs majeurs contribuant aux défis des temps d’attente des provinces :
- Les défis de capacité des hôpitaux datant avant la pandémie COVID-19;
- L’accès limité aux soins à domicile et les soins communautaires pour les personnes âgées;
- La privatisation au lieu d’amélioration au système public;
- La direction limitée du gouvernement pour intensifier les améliorations dans le secteur public;
- Le décalage entre la rémunération des spécialistes et des chirurgiens et le travail d’équipe et l’amélioration du système;
- La collection limitée de données et l’établissement de rapports publics pour soutenir les améliorations et la responsabilité; et;
- La propagation du virus SARS-CoV-2 plaçant une pression constante sur les hôpitaux.
Les provinces canadiennes se sont largement concentrées sur des injections de fonds à court terme – avec une concentration croissante sur la sous-traitance de chirurgies et l’imagerie médicale aux cliniques à but lucratif – au lieu d’une concentration soutenue à la restructuration et à l’amélioration du système. Ce rapport recommande au gouvernement fédéral de lier le financement fédéral nouveau et continu de la santé à la mise en œuvre progressive par les provinces des stratégies politiques suivantes, fondées sur des données concrètes :
- La mise en œuvre de modèles à entrée unique et l’amélioration de gérance des listes d’attente;
- L’amélioration de performance des salles d’opération et la capacité de soins aigus;
- L’amélioration de l’accès aux soins à domicile et aux soins communautaires publics des personnes âgées;
- La réduction des imageries médicales et chirurgies inappropriées.
Ces stratégies devraient être appuyées par une approche pancanadienne consistante à l’apprentissage du système de santé et l’amélioration à la qualité, permis par la législation et appuyé avec le rétablissement du Conseil sur la santé du Canada. L’apprentissage et l’amélioration du système de santé devraient s’inspirer des efforts internationalement reconnus du service national de santé écossais.
Le succès du Canada d’améliorer l’accès aux chirurgies dans un temps opportun dépend sur une nouvelle ère de fédéralisme coopératif en matière de soins de santé, avec la direction et la collaboration fédérale et provinciales. Il est clair que le financement fédéral de la santé doit être accru et cohérent, mais il ne peut plus être transféré aux provinces sans une forte obligation de rendre des comptes et de mettre en œuvre des politiques.
La réduction des temps d’attente par un engagement sans relâche à l’amélioration du système doit être à l’ordre du jour. Les soins de santé publique sont en jeu.
Traduction par le Syndicat du Nouveau-Brunswick
[125] OCDE, 2021.
[126] Cela exclut le financement fédéral dédié à la santé mentale et aux soins à domicile qui a été inclus dans les accords bilatéraux 2016/17 avec les provinces.
[127] Coalition canadienne de la santé et l’Ontario Health Coalition, 2017.
[128] L’institut des finances publiques et de la démocratie, 2017.
[129] Coalition canadienne de la santé et l’Ontario Health Coalition, 2017.
[130] Gouvernement du Canada, 2022.
Macdonald, à venir.
(Couverture : Le Premier ministre Justin Trudeau préside une réunion de travail sur les soins de santé avec les premiers ministres des provinces et territoires du Canada, le 7 février 2023. Ottawa, Ontario. Photo par Adam Scotti, Bureau du premier ministre)