La démission de Justin Trudeau laisse les programmes de soins de santé inachevés
Les moteurs politiques tournent à plein régime à Ottawa après la démission du Premier ministre Justin Trudeau lundi, démission qui a déclenché une course à la direction du parti libéral. Entre-temps, les partis d’opposition ont promis de défaire le gouvernement libéral minoritaire à la première occasion, ce qui déclenchera probablement des élections au printemps.
En même temps que sa démission, M. Trudeau a prorogé le Parlement jusqu’au 24 mars, ce qui a pour effet de mettre en veilleuse tout le processus législatif. La législation en cours au Parlement meurt (si elle n’est pas ressuscitée plus tard avec le soutien de l’opposition), et aucune nouvelle législation ne peut être introduite.
Quel est l’impact de tout cela sur les principales promesses en matière de soins de santé présentés récemment par le gouvernement ?
La Coalition canadienne de la santé a défendu de nombreux programmes et politiques de santé importants depuis le début de la session parlementaire en 2020. Bien que de nombreux progrès aient été réalisés – en particulier grâce à l’accord entre les libéraux et les néo-démocrates (qui a duré de mars 2022 à septembre 2024) certains des nouveaux programmes ne sont pas entièrement mis en œuvre.
Loi sur la sécurité des soins de longue durée
Les libéraux ont promis d’introduire une loi sur la sécurité des soins de longue durée dans leur programme électoral de 2021, réitérant cette promesse dans l’accord conclu avec le NPD, mais aucune loi de ce type n’a jamais été introduite.
En décembre, la Coalition canadienne de la santé a cosigné une lettre ouverte adressée au ministre de la Santé, Mark Holland, et au ministre du Travail, Steven MacKinnon. La lettre ouverte était également signée par la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers, le Congrès du travail du Canada et neuf organisations alliées, pressant le gouvernement fédéral d’introduire une loi sur les soins de longue durée sûrs qui soit obligatoire et applicable, afin que les personnes âgées de tout le pays reçoivent les soins qu’elles méritent.
En même temps que sa démission, M. Trudeau a prorogé le Parlement jusqu’au 24 mars, ce qui a pour effet de mettre en veilleuse tout le processus législatif. Les lois en vigueur au Parlement meurent (si elles ne sont pas ressuscitées plus tard avec le soutien de l’opposition), et aucune nouvelle loi ne peut être introduite, y compris la loi sur la sécurité des soins de longue durée.
Régime canadien de soins dentaires
Le régime fédéral de soins dentaires a été financé et est en cours de déploiement.
Le régime canadien de soins dentaires est destiné à couvrir neuf millions de résidents non assurés dont le revenu familial annuel est inférieur à 90 000 dollars. Toutefois, à l’heure actuelle, seules les personnes âgées de plus de 65 ans, les enfants de moins de 18 ans et les personnes handicapées sont éligibles, ce qui laisse la plus grande cohorte de personnes, celles âgées de 18 à 65 ans, sans couverture dentaire.
La dernière étape de ce programme devait être mise en œuvre au début de 2025 (ou plus tôt, selon le NPD), mais la prorogation risque fort d’avoir un effet néfaste.
Régime national d’assurance médicaments
L’une des plus grandes réalisations de nos campagnes en 2024 a été l’adoption de l’assurance médicaments qui a été promulguée en octobre, quelques semaines avant le dernier jour de la session parlementaire. La loi C-64 sur l’assurance médicaments est financée à hauteur de 1,5 milliard de dollars pour permettre aux provinces et aux territoires d’assurer la couverture publique de la contraception et des médicaments contre le diabète.
Les gouvernements provinciaux et territoriaux doivent conclure des accords bilatéraux avec le gouvernement fédéral afin de recevoir les fonds et de mettre les médicaments gratuits à la disposition de la population. Seule la Colombie britannique a signé un tel accord, mais des semaines se sont écoulées depuis la réélection du gouvernement néo-démocrate à Victoria et l’argent n’a toujours pas été versé.
Le ministre de la santé, M. Holland, a déclaré qu’il souhaitait que des médicaments gratuits soient mis à la disposition de la population d’ici à janvier 2025 et qu’un accord soit conclu avec chaque province d’ici au printemps.. Le Manitoba est une autre province susceptible d’adopter rapidement l’accord, et peut-être le nouveau gouvernement libéral du Nouveau-Brunswick, qui a fait campagne sur la gratuité de la contraception.
Selon le Globe and Mail, Matthew Kronberg, porte-parole du ministre Holland, a déclaré mardi 7 janvier que le gouvernement fédéral était en pourparlers avec chaque province et territoire au sujet de l’assurance-médicaments. « Le ministre Holland continue de discuter directement avec chacun de ses homologues provinciaux et territoriaux », a-t-il déclaré.
L’impact de la prorogation sur les accords bilatéraux relatifs à l’assurance-médicaments n’est pas clair. La législation est en pause, mais les accords bilatéraux avec les provinces ne nécessitent pas l’approbation du Parlement. Néanmoins, le manque de leadership au sein du gouvernement pourrait freiner les progrès en matière d’assurance-médicaments jusqu’au 24 mars. Si comme prévu le gouvernement tombe et nous serons en élections l’avenir du programme n’est pas très positif.
La loi canadienne sur la santé
La Coalition canadienne de la santé s’est jointe à Médecins canadiens pour le régime public et la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers pour demander au ministre de la Santé, Mark Holland, mettre en application la Loi canadienne sur la santé.
Les Canadiens qui ont désespérément besoin de soins de santé se tournent de plus en plus vers les soins virtuels et les infirmières praticiennes, tous deux des services à buts lucratifs. Nombre d’entre eux doivent faire face à des factures inattendues parce que le Canada dispose d’un ensemble de règles disparates régissant la couverture de ces services médicaux essentiels par les régimes d’assurance-maladie provinciaux.
Ensemble, nos membres et alliés sommes rendus à Ottawa pour exhorter le Premier ministre à collaborer avec le ministre de la Santé, Mark Holland, afin de publier immédiatement la lettre d’interprétation de la loi canadienne sur la santé promise depuis longtemps, précisant que les soins virtuels et les soins dispensés par les infirmières praticiennes sont des services médicalement nécessaires pour lesquels les patients ne doivent pas être facturés.
La réponse du cabinet du ministre Holland est toujours « restez à l’écoute ». En réponse au Globe and Mail, le porte-parole Matthew Kronberg a déclaré : « Nous espérons avoir bientôt plus à dire sur la lettre à venir ».
Que se passera-t-il maintenant ?
Avant la prorogation le Parlement était bloqué par l’obstruction procédurale des conservateurs. Les libéraux ne peuvent plus compter sur le soutien du NPD. Les députés vont retourner dans leurs comtés jusqu’au 24 mars, et l’attention se portera sur la course au remplacement de Justin Trudeau à la tête du parti.
Il est trop tôt pour dire si la santé sera au cœur de la course au leadership. Des questions telles que l’assurance-médicaments auraient divisé les membres du cabinet de M. Trudeau entre conservateurs fiscaux et progressistes, et certains d’entre eux se joindront à la course à la chefferie.
En attendant, nous continuerons à demander aux gouvernements de défendre et d’étendre l’assurance-maladie, au diable la prorogation.