Réduire les temps d’attente en chirurgie : une série de solutions, partie I
Il s’agit de la première partie d’une série qui examine les obstacles politiques et solutions afin de réduire les temps d’attente en chirurgie au Canada. Les séries ont été adaptées d’un document de recherche par Andrew Longhurst. Le document au complet avec une liste de références pour les notes de bas de page est disponible ici.
Depuis mars 2020, des milliers de chirurgies planifiés ont été repoussées en raison de la pandémie COVID-19. Plusieurs de ces procédures ont depuis été complétées, mais les temps d’attente continuent de se détériorer. Alors que les temps d’attente ne sont pas un nouveau défi, les pressions sans précédent sur les systèmes de santé amplifient les problèmes de longue date. Les gouvernements fédéral et provincial ont négocié une entente de financement de 10 ans au même instant que plusieurs provinces cherchent à s’impliquer davantage dans la prestation de services chirurgicaux et de diagnostic à des fins lucratives.
Cependant, le poids de la recherche nous indique que la privatisation ne résout pas les défis des temps d’attente publics. Plus de deux décennies de recherche et d’expérience nous disent que le Canada exige du leadership fédéral et provincial beaucoup plus important afin de réduire les temps d’attentes par le biais de stratégies fondées sur des données factuelles. En fait, la sous-traitance de procédures financées par des fonds publics crée des obstacles à la mise en œuvre de ces procédures et au maintien des améliorations publiques nécessaires, et en encourageant le paiement privé, on creuse les inégalités dans l’accès aux soins de santé en fonction de la capacité à payer et non des besoins médicaux.
Au lieu de la privatisation, les gouvernements fédéral et provincial devraient agir rapidement sur les stratégies politiques longtemps bloquées afin de faire un usage beaucoup plus intelligent de notre système de santé publique pour réduire les temps d’attente. Ceci exige que les gouvernements fédéral et provincial prennent une approche coordonnée afin de redéfinir comment les services en chirurgie sont livrés.
Le cas pour des améliorations drastiques au système public est plus urgent que jamais. Depuis le début des années 2000, le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) a commencé à documenter les efforts de groupes locaux de chirurgiens et les administrateurs de systèmes de santé de la mise en œuvre de leurs initiatives promises comme des efficacités des salles d’opération et les modèles de soins en équipe. En 2016, le CCPA évalue l’état des initiatives réussies et promises en C.-B., pour finalement découvrir que plusieurs furent déclassés ou abandonnés en raison du manque de leadership de la régie de la santé et du gouvernement provincial pour faire ces améliorations une pratique courante à l’échelle provinciale. [1]. Cette histoire se ressemble dans d’autres provinces : il existe des poches d’innovation publique prometteuses, mais un manque de leadership fédéral et provincial pour répandre ces pratiques à travers les systèmes de santé.
La capacité du Canada de gérer et réduire les temps d’attente pendant des interruptions majeures du système de santé, comme la COVID-19, dépend sur la mise en pratique de la preuve de recherche et l’apprentissage des politiques. Ces séries fournissent un cadre de stratégies politiques fondées sur des données factuelles qui seront nécessaires pour gérer et réduire les temps d’attente en chirurgie à long terme.
Pourquoi les temps d’attente en chirurgie restent un défi politique persistant
Pendant les dix dernières années, le Canada a connu un succès mitigé sur les réductions des temps d’attente. Au début des années 2000, le gouvernement fédéral a joué un rôle de premier plan dans l’élaboration des politiques et le financement aux gouvernements provinciaux. D’importants progrès ont été réalisés depuis lors, mais les provinces continuent de lutter pour le maintien des améliorations de temps d’attente à long terme. Cela s’explique en grande partie à l’accent mis sur les injections à court terme sans que les provinces soient exigées de mettre en œuvre les améliorations au système.
Depuis le début des années 2000, les provinces ont beaucoup amélioré leur collecte de données sur les temps d’attente et leurs rapports publics. Cependant, les données pancanadiennes sont seulement disponibles pour les quatre « procédures prioritaires » comprises dans le tableau 2. Ces données, publiées publiquement par l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), reflètent Attente 2 (le temps écoulé entre la réservation de l’opération et la fin de l’opération, voir tableau 1), et alors sous-estiment le trajet complet du patient de l’orientation vers les soins primaires à l’achèvement de l’intervention chirurgicale. Le temps d’attente pour l’imagerie diagnostique n’est pas disponible pour toutes les provinces, et les points de référence pancanadiens ne sont pas encore établis.
Tableau 1 : Les temps d’attente pour les patients en chirurgie
D’après l’Institut canadien d’information sur la santé, près de 560 000 interventions chirurgicales en moins ont été réalisées pendant les 16 premiers mois de la pandémie comparativement avec 2019.2 Cela a créé un retard important dans les opérations chirurgicales dans les provinces à un moment où la pandémie en cours et la suppression des mesures de santé publique mettent à rude épreuve la capacité des hôpitaux et le personnel de santé.
Pendant la première vague, plusieurs interventions chirurgicales furent repoussées afin de libérer à titre préventif les ressources de l’hôpital en cas d’augmentation du nombre de patients atteints de la COVID-19 nécessitant des lits d’hospitalisation.3 Les vagues suivantes ont entraîné des retards de chirurgies alors que les hôpitaux luttent avec le maintien de services prévus tout en s’occupant des patients de la COVID-19 et confrontés à de graves pénuries de personnel en raison d’absences et d’épuisements.
Globalement, les provinces ont connu des améliorations importantes pour réduire les temps d’attente depuis 2020.4 Cependant, la réduction importante du total de chirurgies complétées en 2019 (avant la pandémie) comparativement à la même période en 2020 et 2021 indique que les provinces travaillent encore à réduire les retards en matière de chirurgie, et le patient nouveau diagnostiqué qui exige une chirurgie va peut-être attendre plus longtemps en raison de ce retard. Même si c’est le cas, il s’agit d’un testament pour les prestataires de soins de santé et notre système de soins de santé publique que les provinces ont pu augmenter le volume de chirurgies d’à peu près 85 pour cent des niveaux prépandémiques (tableau 2).
Tableau 2 : Nombre total d’interventions chirurgicales réalisées au cours des périodes prépandémique et pandémique au Canada
Comme indiqué dans le tableau 3, la majorité des patients au Canada ont reçu des procédures prioritaires dans le cadre de référence 2 en 2021 :
- Remplacement de la hanche, 65 pour cent des patients ont reçu leur chirurgie du cadre de référence de 26 semaines.
- Remplacement de genou, 59 pour cent des patients ont reçu leur chirurgie du cadre de référence de 26 semaines.
- Réparation de la fracture de la hanche, 85 pour cent des patients ont reçu leur chirurgie du cadre de référence de 48 heures.
- Chirurgie de la cataracte, 66 pour cent de patients ont reçu leur chirurgie du cadre de référence de 16 semaines.
Tableau 3 : Pourcentage des patients qui ont reçu leur chirurgie du cadre de référence, 2021
Et bien que les provinces aient généralement fait des progrès considérables en augmentant les volumes de chirurgie et en réduisant les arriérés, elles ont connu des succès mitigés au cours des trois dernières décennies pour ce qui est de réduire et de maintenir les améliorations des temps d’attente. Les stratégies politiques visant à surmonter ce défi persistant font l’objet de cette série.
- Lire le reste de la série de solutions par Andrew Longhurst, une série de 11 articles sur les moyens de réduire les temps d’attente en chirurgie au Canada.
Traduction par le Syndicat du Nouveau-Brunswick
[1] Longhurst et al., 2016.
[2] ICIS, 2021b.
[3] Trevithick, 2020.
[4] ICIS, 2021b.